De la réaction à l’action
Il y a la colère qui vient d’un modèle parental que je reproduis
Ex : pas d’accord avec mon enfant = droit de crier voire de taper
Si je prends conscience que l’enfant apprend en me regardant
je préfère faire ma carte au trésor et faire cesser en moi ce modèle
pour que ma famille, ma société puissent changer
et ne plus utiliser l’abus de pouvoir pour parvenir à ses fins.
Il y a la haine qui vient d’un autre modèle parental :
« aimer c’est tout donner, dire non c’est méchant, c’est égoïste, ça blesse ».
Je dis oui à l’autre, je fais tout pour lui
et je m’oublie jusqu’à la rancoeur :
je finis par en vouloir à l’autre
de ce que je me fais subir moi-même pour lui
en appelant ça de l’amour.
Ou bien je dis oui à l’autre
et je fais tout pour lui, je m’oublie
et je m’attends à ce qu’il fasse pareil
qu’il à son tour la réponse à mes besoins :
je finis par le couvrir de culpabilité
si lui se respecte et sait me dire non.
Quand je réalise à nouveau que le problème vient de moi,
je me tourne dedans et je vais faire ma carte au trésor.
Alors ce modèle cesse également
pour moi et pour mes descendants.
Et puis, il y a la rage qui vient de l’impuissance
quand je suis face aux cartes au trésor de l’autre :
quand l’autre estime que je dois lui dire oui
parce que lui m’a dit oui avant
et que sa rancoeur explose comme si j’en étais la cause.
Quand l’autre estime normal de crier et s’imposer
parce qu’il est l’adulte et que je suis l’enfant
ou parce qu’il est hiérarchique et moi subordonné
ou parce qu’il est l’époux, l’homme,
ou celui ou celle qui ramène le plus d’argent
parce qu’il est élu au gouvernement
et que je suis simple citoyen informé différemment.
Quand l’autre estime normal de m’agresser
voire me mépriser, me soumettre à son opinion
sous prétexte qu’il n’est pas d’accord avec moi
et que ma vision des choses lui semble nulle,
ridicule, intolérable, ésotérique
et ne répond pas à son cadre ou ses attentes.
Il prend peur ou colère et crie, intimide, rabaisse
au lieu de me rencontrer pour trouver ensemble une solution commune
qui me respecte autant que lui.
Alors monte en moi une révolte :
je ne me laisserai pas faire…
Cette colère là est saine et nécessaire
c’est tout l’intérêt de la colère :
un instinct de survie,
un sursaut pour protéger ce que je suis.
Elle n’est pas un problème à transformer
elle ne peut faire l’objet d’aucune carte au trésor
puisque c’est ma protection face à la carte au trésor de l’autre
qui tente de me faire du mal
parce qu’il me veut différent
comme ont fait sur lui ses parents.
Il doit d’abord admettre que ce qu’il voit au-dehors
parle du dedans.
Je ne peux pas le faire pour lui
ni le forcer à le faire,
ni lui ouvrir les yeux sur sa souffrance
s’il n’est pas prêt à aller voir.
D’ailleurs, plus je veux moins il veut.
Cette colère signe un déséquilibre qui me concerne
mais sur lequel je n’ai aucun pouvoir…
En Gestalt on nomme ça : saine agressivité.
Je montre les dents, c’est un instinct.
Cette colère là m’invite à réagir, me redresser, poser ma limite,
garantir ma dignité, assurer mon intégrité,
me faire entendre et respecter,
être déterminée à protéger mon enfant intérieur
– et extérieur aussi d’ailleurs – quoi qu’il arrive.
Cette saine colère est un élan fort, puissant, déterminé
une source de renouveau, de changement,
de créativité, de beau,
pour mettre au monde dans ma vie
ce nouveau monde auquel je crois…
Mais si je reste dans la situation et qu’elle devient chronique
si je n’arrive pas à partir, au nom de l’amour
si je n’arrive pas à me redresser au nom de je ne sais quel sens du sacrifice,
si je m’accroche à l’espoir que l’autre change,
et que finalement je ne sais pas le voir et l’accepter tel qu’il est
alors, c’est bien ma carte au trésor qui se rejoue…
Ma colère est alors un cri de désespoir
qu’il a quelque chose que je ne parviens pas à lâcher.
12 janvier 2022