…au lieu de ça je parle.
Je parle encore et encore,
des détails, des exemples
qui ont marché.
Je parle pour la convaincre
que je peux l’aider
sur tous les sujets
de sa vie qui ne sont pas
ce qu’elle attend
et dont elle vient de me parler.
Et je finis à 22h30, épuisée.
Je fais ça à chaque fois
et ça ne sert à rien :
Ceux qui veulent venir viendront
ceux qui ne veulent pas,
ne viendront pas.
Des mots accumulés…
…comme mes postes à rallonge
Sur Facebook
qu’on n’arrive pas à lire en entier..
…mes milliers de mots
auprès de mes enfants
qui les empêchent de ressentir
et vivre leur propre expérience.
…comme mon livre
que je n’arrive pas à résumer.
Pourquoi tant de mots ?
Carte au trésor.
Je raccroche
et je laisse venir les sensations,
et les images.
Je sens une envie de hurler.
Je vois le génie dans Aladin :
Will Smith, que j’ai vu ce matin.
Le moment où il hurle
quand il fait sa magie puissante
et son air dépité,
prisonnier de ses bracelets :
Tout puissant qu’il soit,
il ne peut agir
que si l’autre dit « je souhaite que… ».
Alors je m’accompagne.
Je laisse venir la petite moi
devant mes yeux clos :
« Je comprends
ce que tu ressens Anne-Charlotte,
tu te sens impuissante.
Quelle que soit l’efficacité
de cette façon d’accompagner,
tu ne peux pas l’imposer, ni convaincre.
C’est à l’autre de te le demander.
Et s’il ne le souhaite pas,
tu restes impuissante.
Et ça fait mal de voir souffrir.
Et tu as mal parce que tu sais
que l’humain a besoin
d’expérimenter jusqu’au bout
son système avant d’en changer.
Il a besoin de s’effondrer,
que ce soit insupportable.
Comme tu l’as toi-même fait… »
Je laisse sortir les larmes d’impuissance.
Et je rends à chacun
la responsabilité de son chemin.
Mais je sens toujours cette part de moi
qui voudrait faire trembler la terre
exploser je ne sais quel vernis ou résistance.
Mais qui suis-je pour savoir
le chemin juste pour l’autre ?
Ça parle de moi…
Ma petite rejoue son passé.
« Qui veux tu aider comme ça à tout prix ?
Et qui n’a pas envie de ton aide ? »
…ma soeur.
Ma soeur qui restera peut être SDF
alors que celle que je suis devenue aujourd’hui,
est devenue capable de la guérir.
Mes pleurs explosent
et je laisse faire.
Et quand c’est sorti, reconnu, apaisé,
je n’ai plus besoin de parler,
les gens savent que c’est là, c’est possible,
c’est facile et accessible,
et chacun fera comme il le sent.