Avant, quand je rencontrais quelqu’un
je lui parlais sans vraiment écouter.
J’essayais surtout de savoir
ce qu’il avait fait et pas moi.
Comme si le but de la vie était d’avancer.
Il y avait ceux qui étaient allés plus loin
et que je devais rattraper
et ceux, moins loin que j’avais dépassés.
Les premiers avaient tout mon intérêt
et les seconds ma compassion.
Quel mépris…
Quelle erreur !
C’est très humain ça,
l’idée que dans la vie
il faut « avancer ».
Passer dans la classe « suivante ».
Faire carrière.
Quand on part en balade
on a un « itinéraire« ,
on ne se laisse pas flâner, explorer
monter aux arbres et revenir en arrière :
Il faut faire une « boucle« .
En sport il y a la ligne d’arrivée,
qui est souvent à 200 mètres
de la ligne de départ.
Arrêtez-vous, respirez, c’est fini :
il n’y a nulle part où aller.
Tout est déjà à l’intérieur
et vous n’en avez aucune idée.
Le jeu n’est pas d’avancer
c’est de réussir à s’arrêter.
Ce n’est pas d’atteindre un but,
c’est de réaliser l’Unité.
Unité en moi
Unité avec l’autre
grâce à l’autre.
Comment ? Grâce aux autres…
Chaque personne que je rencontre
est une pièce de mon puzzle
comme je suis une pièce du sien.
Et chaque pièce est déjà là,
présente dans ma Vie,
à mesure que je suis prête.
Une personne est plus avancée
sur certains domaines
et moi sur d’autres.
Et la boucle est bouclée
quand l’échange a été fait.
(On le sent parce que la relation
est apaisée des deux côtés.
Plus d’envie, plus de mépris.
On est égaux, côte à côte).
Magique ! Et si simple…
1. Celui qui me semble « meilleur »
possède simplement une qualité
que j’ai à redécouvrir en moi
parce qu’elle n’a pas été reconnue
lorsque j’étais enfant.
2. Celui qui me semble neutre
a un trésor caché que je n’ai pas encore perçu.
3. Mieux ! Celui que je méprise,
condamne, juge ou rejette,
possède une qualité à laquelle
je n’ai pas eu le droit enfant.
C’est pour ça que je réagis si fort.
Le droit à ses ombres, au repos, à l’impatience
à l’erreur, à la suffisance, à la joie et l’innocence.
Le droit à ne plus avancer et enfin s’arrêter.
Je méprisais cette amie qui se disait fatiguée
moi qui après un cancer et un burn out
étais incapable de m’arrêter avant de dormir à 23h
et me levais tous les matins à 5h
sans jamais me reposer.
Je méprisais ce mari dans son canapé
si l’envie lui prenait
qui jouait simplement avec les enfants
moi qui étais incapable de l’imiter.
Je condamnais mes parents
alors que j’étais arrivée au même point qu’eux
avant de trouver comment tout transformer
Je me sentais plus évoluée que ma soeur
alors que SDF elle avait trouvé comment être libre
tandis que moi je passais ma vie à correspondre
aux attentes de tous ces gens qui me faisaient si peur.
Je méprisais cette amie « superficielle »,
bien habillée, maquillée, soignée
moi qui avais été jugée Jézabelle par ma mère,
quand je mettais mon corps en valeur
et traitée de bourge après ma première esthéticienne.
Moi dont les parents sauveurs et corvéables à merci
n’ont jamais su prendre soin d’eux-mêmes.
Je rejetais cette amie qui parlait dans le dos des gens
moi qui parlait d’elle dans son dos,
en me trouvant de bonnes excuses.
« C’est différent ».
J’agressais mes enfants dès qu’ils ne savaient pas
ne réussissaient pas ou prenaient leur temps,
moi qui avais cru devoir être si douée et efficace
de peur d’être critiquée comme ma soeur l’avait été.
J’admirais cette thérapeute si assurée et douée
moi qui ai fini un jour par devoir m’accompagner moi-même
pendant ses séances tant elle ne saisissait pas
la souffrance que mon enfant intérieur rejouait
et s’arrêtait à la projection de ses croyances à elle…
…ça a marché à chaque fois
A chaque fois j’ai libéré quelque chose
qui se rejouait de moi dans la relation.
Alors j’ai plongé dans le jeu :
ramener en séance une à une
toutes les personnes qui étaient pour moi un but
et celles que j’aurais volontiers laissées derrière.
Et chaque personne de ma vie
est devenue un cadeau.
Je suis juste un peu frustrée
pour les personnes qui m’ont jugée
sans prendre le temps de me comprendre,
j’aurais moi-aussi aimer montrer
là où j’avais avancé et pas eux.
Mais je sais que c’est mon enfant intérieur
qui vit mal le regard de mépris qu’il reçoit
et je le rassure en lui disant tout bas
« tu n’es pas ce que les gens voient de toi ».
Et je sais que toutes ces personnes
trouveront leur chemin
comme j’ai trouvé le mien.
Oups ! Non pardon, pas leur « chemin » !
Il n’y a nulle part ou aller
nul besoin d’avancer,
pas mieux ailleurs,
ni mieux après
juste ouvrir les yeux
pour voir au-dehors
ce qu’il me reste à trouver
pour me rejoindre dedans,
au centre, au coeur et alignée,
retrouver ma nature profonde
Etre Soi tout entier.